Le soin
Le soin concerne d’abord l’humanité !
Les mésusages sont des paradoxes. Le soin doit faire le tour des paradoxes, une forme de remise en question permanente de ce que doit être la « bonne » attitude et la « bonne » mesure.
Les soins et la prévention des addictions concernent aussi la politique, la régulation des médias et du marketing, l’éducation, l’attention aux familles, la justice, autant que les intervenants de la psyché et du soma.
L’addiction est conséquence des cultes voués aux objets en lieu et place du sujet. Le soin porte toute son attention au sujet, à son histoire et aux contextes. L’addiction est très souvent une violence qui essaie de réparer des violences antérieures, des violences subies. En amont des addictions et des comportements addictifs se rencontrent toujours des déficits affectifs, des traumatismes et des violences subies. L’addiction est une barrière que s’impose l’addict, un repère dans un univers trouble.
La parole
Le fait de poser la question sur les usages de l’alcool permet d’évoquer les limites des mésusages. La parole est une étape importante. Le repérage précoce et l’information brève (RPIB) est une recommandation faites aux soignants de poser la question des quantités d’alcool consommées, d’après les réponses, d’exprimer le risque et les limites raisonnables. Les études montrent que le RPIB réduit les risques de façon significatives.
La parole est indispensable dans les situations où les risques sont très élevés : la grossesse. L’alcool, même à faibles doses peut entrainer des lésions neuronales pour l’enfant à naitre. Ces lésions sont responsables de troubles du développement de l’enfant.
Le contact avec l’alcool avant la maturité est à risques élevés. L’alcool avant la majorité impacte fortement les comportements dans le sens de la banalisation de la consommation en quantité et en fréquence. L’initiation à l’alcool doit se faire le plus tard possible, la majorité est un minimum nécessaire. La maturation des humains est aussi tardive que complexe. 18 ans est l’âge de la distanciation et de l’acquisition d’autres comportement vers l’âge adulte. L’alcool est un perturbateur de ces étapes. Les jeunes-gens trouvent dans l’alcool un effet désinhibiteur qui est aussi un risque. Risque d’addiction à cet effet de désinhibition qui passe pour le bonheur. Risque d’accident lié aux perturbations sensorielles, spatiales et psychiques de la désinhibition (un grand nombre d’accident de la circulation sont en lien avec l’alcool, la principale cause de décès chez les jeunes est l’alcool).
(Pour mémoire, une note de l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies publiée en 2015 évaluait le coût social de la consommation d’alcool à 120 milliards d’euros par an.)
La motivation
La motivation de changer commence par la conscience de se trouver dans un usage acceptable ou dans un mésusage avéré. Ladite conscience est affectée par les effets des produits et la place sociale de ces produits. La motivation émerge de la personne elle-même ou de son environnement, la famille, les proches, de l’entourage professionnel ou du médecin. Poser la question sur les usages de l’alcool permet d’évoquer les limites des mésusages.
La motivation à changer les modalités des usages équivaut à se promener à proximité d’une falaise. De se trouver alternativement en haut, ou en bas de la falaise…. en haut, le vertige de la chute… en bas, la difficulté de l’ascension… en haut, la beauté et la profondeur des horizons… en bas, la puissance de la nature.
Motiver la motivation ne fait pas appel à la volonté ! Le concept de volonté se trouve dans l’épaisseur de la falaise. La volonté se trouve dans les neurones, entre ceux qui perçoivent et ceux qui agissent. Par exemple, la perception de la soif, quelques cellules manquent d’eau, les cellules de la bouche sont certainement les plus sensibles. Cette perception de la soif met en activité la recherche de l’eau (et autres liquides). La « volonté » de trouver à se réhydrater est mise en action par une chaine d’action vitale. Le « réflexe conditionné » est proche. Les personnes addictes ont des circuits de commande entre le besoin et l’action très puissants. S’il y avait une place pour la volonté, ils ne viendraient pas demander des soins. Nous sommes tous dépendants de circuits vitaux où « la volonté » a peu de prises. L’exemple de la nicotine est particulièrement criant, quand les neurones sensibles ont goûté à l’abondance de nicotine, ils ne laissent aucune place (ou bien peu) à l’absence de recherche du tabac. Alors que le tabac présente objectivement très peu de bénéfices, le consommateur éprouve du plaisir à fumer.